Existe-t-il un chômage réparateur ?

Le taux de chômage en France s'établit à 7,5% de la population active. cette situation reste souvent stigmatisée et source d'anxiété. Le chômage est fréquemment associé à l'instabilité et au déclassement, ce qui peut engendrer un sentiment de peur et de dévalorisation. Est-il possible de vivre cette période non pas comme un anéantissement, mais comme une reconstruction ?

Les recherches sociologiques montrent que l'expérience du chômage n'est pas uniforme et qu’il existe une diversité de vécus. Je vais me baser sur la mienne et celles de mes proches. J’ai connu plusieurs périodes en étant inscrit à Pôle Emploi / France Travail dans ma vie. Pourtant, je n’ai jamais eu l’impression d’être inactif ou de n’avoir tout simplement “rien fait”. Et, dans tous les cas, cela n’aurait pas été grave. J’ai toujours tenté de rebondir, d'entretenir un réseau (malgré une certaine forme d’anxiété sociale) pour espérer avoir des opportunités. En parallèle, je me suis formé, instruit et tenu au courant des différentes avancées et évolutions de mon milieu professionnel. Pour moi, le “chômage” n’a jamais été synonyme de paresse. Pourtant, dans le regard des autres, ce n’est pas toujours ce qui se reflète. Il est donc important de distinguer les notions de “travail” et “d’emploi”. On peut travailler, sans forcément avoir d’employeur.

Un changement de perspective qui n’est pas offert à tout le monde

On nous dit que malgré les pressions financières et sociales, le chômage peut être vu comme une opportunité de faire le point sur ses compétences et aspirations professionnelles. Du moins pour les cadres sans enfant, catégorie plus favorisée par ce changement de statut. Les obstacles à la reconstruction sont avant tout matériels. En juin 2020, plus de la moitié des demandeurs d'emploi indemnisés recevaient une allocation inférieure à 1 088 euros. Dans ces conditions, il est compréhensible que la préoccupation de joindre les deux bouts, notamment en matière de logement, et la difficulté de prendre du temps soient omniprésentes.

Pressions et culpabilité

Les injonctions de l’État à retrouver rapidement un travail ne facilitent pas les choses. France Travail exige de suivre un parcours de plus en plus formaté pour prouver qu’on est en recherche active. Pourtant, ne rien faire, c’est l’occasion de laisser émerger des parties de soi enfouies par un rythme effréné qui ne permet plus de penser sa vie. Si la pression est extérieure, elle peut aussi être intégrée. L’image de la personne fainéante et profiteuse est tellement imprégnée en chacun de nous, qu’il est difficile de ne pas ressentir une forme de culpabilité. Ces idées culpabilisantes sont les mêmes qui pèsent sur les épaules des salariés qui voudraient sortir d’un schéma qui ne leur conviendrait plus.

Réévaluation de soi

Le chômage ébranle notre identité. Nous avons trop souvent l'habitude d'être définis par notre travail. Lorsque nous rencontrons quelqu'un pour la première fois, combien de fois mettons-nous en avant notre activité professionnelle ou sommes-nous interrogés à ce sujet si nous ne le faisons pas spontanément ? Dire "je suis actuellement sans emploi", avec tous les stéréotypes qui pèsent sur ce statut, ne peut qu'altérer notre identité sociale. Pourtant, nous devrions comprendre que la valeur d'une personne ne se résume pas à sa vie professionnelle.

Maintien d’une structure

Pour ceux qui peuvent se le permettre, le chômage est donc l’occasion de se former et d'acquérir de nouvelles compétences, d'explorer de nouvelles voies professionnelles et de prendre du recul pour redéfinir ses priorités de vie. Répétez-le-vous : le chômage n'est pas un échec personnel, mais une situation temporaire qui peut être utilisée pour se réinventer. Pour cela, il est crucial de garder un rythme et des routines quotidiennes pour maintenir un cadre dans sa vie. Se fixer des objectifs à court et moyen terme permet de rester motivé.e et de donner un sens à ses journées. En envisageant le chômage comme une phase de transition, il est possible de se préparer efficacement pour…. un avenir différent. Car le chômage est moins une crise de statut qu'une crise de l'avenir.

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